Fasc. 626 : INSCRIPTION DE FAUX

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JurisClasseur Procédure civile

Fasc. 626 : INSCRIPTION DE FAUX

Date du fascicule : 15 Octobre 2012

Date de la dernière mise à jour : 21 Janvier 2014

Irène Tallon - Docteur en droit - Avocat honoraire au barreau de Clermont-Ferrand - Maître de conférences honoraire à la Faculté de droit

Refondu par Raymond MARTIN - Docteur en droit - Avocat honoraire

Actualisé par Véronique MIKALEF-TOUDIC - Maître de conférences HDR à l'université de Caen-Basse-Normandie - Membre du Centre de Recherches en Droit Privé (Université de Caen) - Membre associé de l'Institut de Recherches en Droit des Affaires (Université de Paris 13, PRES Sorbonne Paris Cité)

Mises à jour

Mise à jour du 21/01/2014 - §72. - La communication au ministère public est faite à la diligence du juge

Points-clés 

Seuls les actes authentiques sont susceptibles de l'inscription de faux (V. n° 11 ).

Le faux peut être matériel ou intellectuel (V. n° 7 à 10 ).

L'action civile et l'action pénale sont indépendantes, sauf la possibilité pour la juridiction civile de surseoir à statuer s'il existe une poursuite pénale (V. n° 39 à 51 ).

L'incident de faux peut être soulevé à titre principal ou à titre incident (V. n° 58 à 93 ).

La demande d'inscription de faux doit être précédée d'un acte d'inscription de faux (V. n° 53 à 56 ).

La procédure de droit commun de l'inscription de faux à titre incident relève de la compétence du tribunal de grande instance ou de la cour d'appel (V. n° 57 à 77 ).

Le tribunal de grande instance a une compétence exclusivepour connaître de l'inscription de faux demandée à titre principal (V. n° 85 à 93 ).

Les juridictions d'exception ne peuvent connaître de l'inscription de faux (V. n° 78 à 84 ).

Une procédure spéciale est prévue pour la Cour de cassation(V. n° 94 à 104 ).

Introduction

1. – Présentation – Le sous-titre du Code de procédure civile intitulé "Les contestations relatives à la preuve littérale" distingue entre les contestations relatives aux actes sous seings privés (V. JCl. Procédure civile, Fasc. 624 ) et l'inscription de faux contre les actes authentiques.

 

2. – Fondement de la distinction – Le législateur a fait le choix de distinguer selon la nature de l'acte contesté. La contestation d'une écriture privée relève de la procédure de vérification d'écritures alors que celle d'un acte authentique obéit aux règles de l'inscription de faux (H. Solus et R. Perrot, Droit judiciaire privé, t. 3, Procédure de première instance : Sirey 1991n° 666, p. 574). Même si la terminologie exacte est "l'inscription de faux contre les actes authentiques", il est habituel de désigner cette procédure uniquement "l'inscription de faux" puisqu'il s'agit d'une procédure spécifique au faux en matière d'acte authentique.

 

3. – Ancien Code de procédure civile – Le Code de procédure civile de 1806 connaissait le faux incident civil, procédure extrêmement longue et complexe. Elle comportait trois étapes successives assorties de trois jugements statuant sur la recevabilité de l'action, les moyens de l'établissement du faux et la matérialité du faux. Il s'agissait uniquement d'une demande incidente, soulevée à l'occasion d'un litige en cours ; le faux à titre principal n'existait pas.

 

4. – Droit positif – Les règles applicables à l'inscription de faux ont été réformées par le décret n° 73-1122 du 17 décembre 1973 (JO 22 déc. 1973, p. 13660) dont les dispositions ont été intégrées au Code de procédure civile aux articles 303 à 316. La réforme a permis une simplification et une rationalisation de la matière. Dorénavant, le Code de procédure civile distingue l'inscription de faux incidente et l'inscription de faux à titre principal.

 

5. – Plan – Que ce soit à titre incident ou à titre principal, le domaine (I) et l'acte préalable d'inscription de faux (II) obéissent aux mêmes règles ; seules les procédures suivies (III) diffèrent.

I. - Domaine de l'inscription de faux 

6. – Présentation – Afin de définir le domaine de l'inscription de faux, il est nécessaire de distinguer le faux matériel du faux intellectuel (A), de déterminer les actes authentiques pouvant faire l'objet d'une procédure inscription de faux (B) avant d'envisager les rapports entre le faux civil et le faux pénal (C).

A. - Faux matériel et faux intellectuel 

7. – Intérêt de la distinction – En ce qui concerne les écritures privées, seul un faux matériel peut ouvrir la voie de la procédure de vérification d'écriture. Au contraire, l'acte authentique et sa force probante peuvent être altérés soit matériellement soit intellectuellement.

 

8. – Le faux matériel – Le faux matériel est l'œuvre d'un faussaire. Il peut consister en la fabrication d'un acte entièrement faux ou en l'altération ou la falsification d'un acte existant par des ratures, des surcharges ou des additions.

 

9. – Le faux intellectuel – Le faux intellectuel ne comporte aucune falsification matérielle de l'acte, aucune intervention sur l'instrumentum. Il consiste pour le rédacteur de l'acte authentique à énoncer des faits ou à rapporter des déclarations inexactes. Par exemple, le notaire affirme dans l'acte que le prix a été versé à sa vue ce qui est inexact ou l'huissier de justice antidate un acte de signification alors que le délai est expiré.

 

10. – Conséquences de la distinction – Le faux intellectuel ne peut concerner que les seuls actes authentiques. En effet, le droit français donne effet à la volonté vraie mais dissimulée des parties à un acte sous seing privé. Si une personne entend paralyser les effets d'un acte sous seing privé qu'elle prétend mensonger, elle ne peut pas utiliser la procédure de déclaration de faux mais l'action en déclaration de simulation. À l'inverse, la relation par un officier public de faits qu'il affirme s'être produits en sa présence doit traduire fidèlement la vérité et non pas la dénaturer. C'est la fonction même de l'officier public. Il ne peut sciemment participer à la rédaction d'un acte simulé. L'acte dressé par l'officier public vaut jusqu'à inscription de faux car son rédacteur est, a priori, cru sur parole. Le faux intellectuel sciemment commis est une éventualité particulièrement grave et rare. Il constitue pour l'officier public une infraction pénale. Cependant, la procédure d'inscription de faux ne s'applique qu'aux déclarations dont l'officier public doit vérifier l'exactitude. S'il recueille une déclaration, même mensongère, dont il n'a pas pour mission de vérifier la réalité, la vérité peut être rétablie par tous moyens de preuve du droit commun, au besoin par l'action en simulation.

B. - Acte authentique, objet de l'inscription de faux 

11. – Actes visés – Aux termes de l'article 1317 du Code civil , l'acte authentique est "celui qui a été reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé et avec les solennités requises". Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 , il peut être dressé sur support électronique sous certaines conditions fixées par décret (V. D. n° 71-941, 26 nov. 1971 relatif aux actes établis par les notaires  : JO 3 déc. 1971, p. 11795, mod. par D. n° 2005-973, 10 août 2005  : JO 11 août, p. 13096, texte n° 34. – Sur cette question, M. Grimaldi et B. Reynis : L'acte authentique électronique : Defrénois 2003, p. 1023. – L. Jacques : L'authenticité de l'acte authentique électronique, Comm. com. électr. 2003, chron. 1 . – J. Huet, L'acte authentique électronique, petit mode d'emploi [D. n° 2005-972 et n° 2005-973, 10 août 2005 ] : D. 2005, p. 2903]). La procédure d'inscription de faux concerne notamment les actes notariés (1°), les actes de l'état civil (2°), les actes d'huissier de justice (3°), les actes du greffier (4°) ainsi que les actes du juge (5°) et ceux des commissaires-priseurs judiciaires (6°). Cependant, les rapports d'expert judiciaire doivent être mis à part puisqu'ils ne constituent pas des actes authentiques (7°).

1° Actes notariés 

12. – Force probante de l'acte notarié – Le rôle du notaire consiste à donner forme et force authentique aux conventions des personnes privées. Les projets d'actes tels que le projet d'état liquidatif d'un régime matrimonial n'est pas un acte en la forme notariée et ne revêt pas le caractère d'un acte authentique (Cass. 1re civ., 12 juill. 2006 : Bull. civ. 2006, I, n° 394, p. 339). Les énonciations figurant dans l'acte authentique concernant des faits que le notaire rédacteur a pu constater lui-même font preuve jusqu'à inscription de faux. Cependant, les documents annexés à un acte notarié ne font pas foi jusqu'à inscription de faux (Cass. 1re civ., 7 oct. 1997 : Bull. civ. 1997, I, n° 267, p. 181 ; JCP G 1997, IV, n° 2275, p. 360  ; JCP N 1997, 44, en bref 1329 ; JCP N 1998, p. 57  ; Defrénois 1998, p. 533 ; D. 1997, p. 225 ; Gaz. Pal. 1997, pan., p. 314. – Cass. 1re civ., 26 oct. 2004, n° 02-19.043  : JurisData n° 2004-025406 . – Cass. 1re civ., 7 juill. 2011, n° 10-10.487, 765  : JurisData n° 2011-013743 ).

De plus, même si l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux de l'existence matérielle des faits que l'officier public énonce comme s'étant passés en sa présence, les juges conservent tout pouvoir pour interpréter les clauses insérées dans ces actes lorsqu'elles présentent un sens obscur, ambigu ou contradictoire (Cass. com., 2 déc. 1974 : Bull. civ. 1974, IV, n° 311, p. 257).

13. – Exemples d'énonciations valant jusqu'à inscription de faux – L'énonciation dans l'acte que ce dernier a été reçu devant le notaire dont le nom est énoncé selon les affirmations d'usage fait foi jusqu'à inscription de faux (Cass. 1re civ., 27 janv. 1987 : Bull. civ. 1987, I, n° 12, p. 105 ; JCP G 1987, 20881  ; JCP N 1988, p. 327). Il en est ainsi également, lorsque le notaire affirme qu'un testament authentique lui a été dicté par le testateur (Cass. 1re civ., 28 févr. 1961 : JCP A 1961, IV, p. 59 ; Bull. civ. 1961, I, n° 132. – Cass. 1re civ., 18 mai 2011, n° 09-15.231, 508  : JurisData n° 2011-009086 ), qu'il a lu le testament au testateur et que celui-ci l'a bien compris (Cass. 1re civ., 29 mai 1962 : Bull. civ. 1962, I, n° 275 ; JCP A 1962, IV, p. 98 ; D. 1962, p. 627 ; Gaz. Pal. 1962, 2, p. 92) ou qu'il mentionne la présence de témoins instrumentaires (Cass. 1re civ., 9 oct. 1962 : Gaz. Pal. 1962, 2, p. 299).

C'est également le cas lorsque le notaire précise que le prix a été versé en sa présence (Cass. 3e civ., 19 mars 1974 : Bull. civ. 1974, III, n° 135, p. 102. – Cass. 1re civ., 8 janv. 1975 : Bull. civ. 1975, I, n° 10, p. 10) ou que le prix de vente d'un terrain a été payé par les deux époux séparés de biens (CA Paris, 1re ch., 11 juill. 1991 : JurisData n° 1991-047800 ) ou au profit des deux époux séparés de biens(Cass. 1re civ., 19 mars 2008 : Bull. civ. 2008, I, n° 86 ; Rev. Lamy dr. civ. 2008, n° 3000, obs. Jeanne) ou encore que telle parcelle fait partie des biens vendus (Cass. 3e civ., 24 janv. 1990, n° 88-13.553  :JurisData n° 1990-000233 ).

14. – Faits non personnellement constatés par le notaire – La procédure d'inscription de faux n'a pas lieu d'être lorsque le notaire énonce des faits qu'il n'a pas personnellement constatés. Dans ce cas, la preuve contraire est possible dans les conditions de droit commun. S'il s'agit d'une déclaration relative à un fait juridique, la preuve et libre et si elle concerne un acte juridique, la preuve par écrit s'impose en application de l'article 1341 du Code civil . Le dol et la fraude peuvent être prouvés par tous moyens.

 

15. – Exemples d'énonciations ne valant pas jusqu'à inscription de faux – Sont soumises au droit commun de la preuve, les énonciations relatives à l'état mental d'une partie au moment de la conclusion de l'acte (Cass. 1re civ., 25 mai 1959 : JCP G 1959, IV, p. 86 ; Bull. civ. 1959, I, n° 265. – Cass. 1re civ., 28 févr. 1961, préc. supra n° 13 . – Cass. 1re civ., 29 mai 1962, préc. supra n° 13 ), à la santé d'esprit du testateur (Cass. 1re civ., 13 avr. 1964 : JCP A 1964, II, p. 13721, note P. Voirin. – Cass. 1re civ., 20 mars 1973 : Bull. civ. 1973, I, n° 110, p. 321. – Cass. 1re civ., 25 mai 1987 : Bull. civ. 1987, I, n° 171, p. 129 ; D. 1988, p. 79, note A. Breton ; JCP N 1988, p. 39, note J.-F. Pillebout ; Defrénois 1988, p. 254).

Les énonciations de l'acte relatant les déclarations du testateur quant à l'intelligence du testament et à sa conformité à sa volonté ne font pas foi jusqu'à inscription de faux (Cass. 1re civ., 17 nov. 1976 : Bull. civ. 1976, I, n° 352, p. 278). Peut également faire l'objet de la preuve contraire le certificat d'urbanisme joint à l'acte de vente (CA Montpellier, 1re ch., 13 juin 1991 : JurisData n° 1991-034671 ) ou la désignation ou la superficie des parcelles vendues ou attribuées dans un lot de donation-partage (Cass. 3e civ., 25 janv. 1972 : Bull. civ. 1972, III, n° 53, p. 39. – Cass. 3e civ., 27 mars 1973 : Bull. civ. 1973, III, n° 230, p. 166. – Cass. 3e civ., 26 juin 1973 : Bull. civ. 1973, III, n° 443, p. 322. – Cass. 3e civ., 3 mars 1993 : JCP N 1993, II, 149, note C. Destame. – Cass 1re civ., 2 nov. 2005 : Bull. civ. 2005, I, n° 399, p. 332 ; RTD civ. 2006, p. 767, obs. J. Mestre et B. Fages) ou les origines de propriété figurant dans les titres et selon les dires des parties (Cass. 3e civ., 13 févr. 2002, n° 00-18.248 ).

Il en est de même de l'énonciation de l'acte selon laquelle une somme d'argent a été payée avant la rédaction de l'acte notarié et hors la vue du notaire (Cass. 3e civ., 6 févr. 1973 : Bull. civ. 1973, III, n° 103, p. 74. – Cass. 1re civ., 1er déc. 2011, n° 10-24.813, 1194  : JurisData n° 2011-027602 ) ou de l'identification de parts sociales selon un tableau représentant le capital social non dressé par le notaire (Cass. 1re civ., 8 nov. 1989, n° 88-12.538  : JurisData n° 1989-003522 ) ou des déclarations des parties devant le notaire (Cass. 1re civ., 13 mai 1986 : Bull. civ. 1986, I, n° 122, p. 123. – Cass. com., 16 janv. 1990, n° 88-15.074  : JurisData n° 1990-000043 ). Il en est de même quant à la détermination de l'origine des deniers employés lors d'une acquisition (Cass. 1re civ., 27 juin 1973 : Bull. civ. 1973, I, n° 220, p. 194. – Cass. 1re civ., 17 juill. 1973 : Bull. civ. 1973, I, n° 248, p. 218).

16. – Mentions non incorporées à l'acte – Une mention apposée au bas de l'acte, après les signatures des parties et qui ne peut valoir comme renvoi, n'est pas incorporée à l'acte. Elle peut être déclarée nulle sans avoir recours à l'inscription de faux (Cass. 1re civ., 21 déc. 1971 : Bull. civ. 1971, I, n° 324, p. 276). D'une manière générale, il est possible d'appliquer cette solution à toutes les causes de nullité. Si l'acte contient un vice qui peut être cause de nullité, il est inutile de recourir à l'inscription de faux.

17. – Hypothèse de la simulation – Si une partie entend prouver qu'une déclaration du notaire dissimule une opération occulte, voulue par les parties, il ne s'avère pas nécessaire d'utiliser la procédure d'inscription de faux puisque la simulation n'est pas l'œuvre du notaire. La simulation n'entraîne pas la nullité de l'acte. Il faut, dans ce cas, exercer l'action en simulation (Cass. 1re civ., 6 juin 1966 : Bull. civ. 1966, I, n° 342. – Cass. 1re civ., 20 oct. 1971 : Bull. civ. 1971, I, n° 270, p. 228. – Cass. 3e civ., 22 févr. 1972 : Bull. civ. 1972, III, n° 120, p. 88. – Cass. com., 12 nov. 1974 : Bull. civ. 1974, IV, n° 286, p. 235. – Cass. 1re civ., 4 mars 1981 : Bull. civ. 1981, I, n° 79. – Cass. com., 19 nov. 2002 : Bull. civ. 2002, IV, n° 174, p. 199).

2° Actes de l'état civil 

18. – Objet de la contestation – Si l'on veut démontrer que l'officier d'état civil a altéré les faits qui se sont passés devant lui ou les déclarations qui lui ont été faites, il faut recourir à la procédure d'inscription de faux. Mais, si l'on soutient que les déclarations qui ont été correctement enregistrées par l'officier d'état civil sont inexactes ou mensongères, la procédure à suivre est celle de la rectification d'acte ou de l'action d'état.

 

19. – Mentions faisant foi jusqu'à inscription de faux – La mention de la date de l'acte, de la personne et de la qualité de l'officier d'état civil, que telle personne ayant décliné tel nom et indiqué avoir tel domicile a comparu devant l'officier d'état civil et lui a fait les déclarations qui sont rapportées font foi jusqu'à inscription de faux.

 

20. – Mentions faisant foi jusqu'à preuve contraire – L'identité même des comparants qui ne fait pas l'objet d'une vérification par l'officier d'état civil et la véracité des faits relatés par ces comparants ne font foi que jusqu'à preuve contraire.

 

21. – Auteur de l'acte – La force probante des actes de l'état civil est la même que ces actes soient dressés par l'officier public lui-même ou par des agents communaux délégués par lui.

 

22. – Force probante des copies et extraits d'actes – En application de l'article 13 du décret n° 62-921 du 3 août 1962 modifiant certaines règles relatives aux actes de l'état civil (JO 9 août 1962, p. 7918)modifié par le décret n° 68-148 du 15 février 1968(JO 17 févr. 1968, p. 1780)"les copies et les extraits des actes de l'état civil portant la date de leur délivrance et revêtus de la signature et du sceau de l'autorité qui les aura délivrés feront foi jusqu'à inscription de faux". Il en est de même pour le livret de famille en application de l'article 13 du décret n° 74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille et à l'information des futurs époux sur le droit de la famille (JO 18 mai 1974, p. 5349) modifié par le décret n° 2002-1556 du 23 décembre 2002 (JO 29 déc. 2002, p. 21942, texte n° 1 ). Cependant, les fiches individuelles ou familiales d'état civil n'ont qu'un rôle de renseignement et ne bénéficient pas d'une force probante jusqu'à inscription de faux.

 

23. – Reconnaissance d'un enfant – Sous l'empire de l'ancien article 339 du Code civil , il a été décidé que la reconnaissance mensongère d'un enfant naturel dans un acte de l'état civil ne constituait pas en soi un faux punissable puisque cette déclaration pouvait être contestée par son auteur lui-même (Cass. crim., 8 mars 1988 : D. 1989, p. 528, note E. S. de la Marnierre ; JCP G 1989, II, 21162, note W. Jeandidier). Dorénavant, le nouvel article 332, alinéa 2, du Code civil prévoit que "la paternité peut être contestée en rapportant la preuve que le mari ou l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père". On peut supposer que la solution sera identique puisqu'il est toujours possible de contester la paternité de l'auteur de la reconnaissance.

3° Actes d'huissier de justice 

24. – Significations et constats – Parmi les actes d'huissiers de justice, il faut distinguer les significations et les constats. Seules les significations ont la qualité d'acte authentique. Même lorsque l'huissier de justice est commis par justice, la relation de faits inscrits dans un constat ne fait foi que jusqu'à preuve contraire.

 

25. – Mentions faisant foi jusqu'à inscription de faux – Les énonciations relatant des circonstances que l'huissier a pour fonction de certifier font foi jusqu'à inscription de faux contrairement aux mentions qui ne font que rapporter les prétentions des parties. Il s'agit notamment de la date de l'acte, de la délivrance de la copie, le "parlant à..." et les formalités qui l'accompagnent telles que le dépôt en mairie (Cass. 2e civ., 20 nov. 1991, n° 90-15.591  : JurisData n° 1991-003077 . – CA Paris, 1re ch., 27 mai 1991 : JurisData n° 1991-600369 . – TGI Paris, 4 avr. 1990 : JurisData n° 1990-020966 ) ou l'avis de passage (Cass. 2e civ., 2 avr. 1990, n° 89-10.933  : JurisData n° 1990-000915 . – CA Paris, 1re ch., sect. B, 10 oct. 1991 : JurisData n° 1991-024361 . – CA Paris, 1re ch., sect. urgences, 5 févr. 1991 : JurisData n° 1991-020340. – CA Paris, 8e ch., sect. B, 25 janv. 1991 :JurisData n° 1991-020078 . – Cass. 3e civ., 22 févr. 2006 : Bull. civ. 2006, III, n° 44, p. 35).

 

26. – Procès-verbal de saisie-contrefaçon – Le procès-verbal de saisie-contrefaçon qui peut être dressé par l'huissier de justice, concurremment avec le commissaire de police et le juge d'instance, fait foi jusqu'à inscription de faux (Cass. com., 4 janv. 1984 : Gaz. Pal. 1984, 1, pan. jurispr. p. 191). Il a été admis que l'acte valait jusqu'à inscription de faux même s'il n'a pas été établi par l'huissier lui-même en raison du caractère extrêmement technique de la description requise (CA Nancy, 1re ch., 12 mars 1991 : JurisData n° 1991-051438 ).

4° Actes du greffier 

27. – Actes visés – En règle générale, le greffier est le porte-plume du juge et les actes qu'il écrit sont des actes du juge qui sont ensuite avalisés par la signature du juge. Mais il arrive que le greffier dresse des actes en vertu d'un pouvoir qui lui est propre et qui ont valeur authentique. Tel est le cas du certificat qu'il délivre, constatant dans une procédure d'injonction de payer, l'absence de contredit. Le certificat erroné peut faire l'objet d'une inscription de faux (Cass. 2e civ., 31 mai 1976 : Bull. civ. 1976, II, n° 184, p. 143). Il en est de même pour la déclaration d'appel reçue par le greffier de la cour d'appel, de la déclaration d'un pourvoi en cassation contre un jugement d'un conseil de prud'hommes reçue par le greffier de cette juridiction (Cass. soc., 22 janv. 1991, n° 87-42.844, 87-42.845, 87-42.847  : JurisData n° 1991-000285  ; Bull. civ. 1991, V, n° 35 p. 21 ; JCP G 1991, IV, 106 ; D. 1991, inf. rap. p. 44 et 45 ; Gaz. Pal. 1991, pan. jurispr. p. 248. – Cass. crim., 16 nov. 1994 : Bull. crim. 1994, n° 364, p. 895 ; JCP G 1995, IV, 471 ) ou encore du contredit de compétence reçu par le greffier de première instance pour les mentions que le greffier a pu lui-même vérifier, notamment en ce qui concerne la date de la déclaration ou du contredit (Cass. 2e civ., 15 juill. 1981 : Bull. civ. 1981, II, n° 161), la personne qui l'a fait.

 

28. – Plumitif d'audience – Les énonciations du plumitif d'audience consistent en de simples notes dépourvues de tout caractère authentique. La procédure d'inscription de faux ne peut s'appliquer à leur contestation (Cass. soc., 18 nov. 1955 : D. 1956, p. 116). Ainsi, les énonciations d'un plumitif non signées ne peuvent prévaloir contre la minute d'un jugement régulièrement signée : la demande d'inscription de faux contre un arrêt mentionnant une certaine composition de la cour dont l'inexactitude résulterait des mentions du plumitif d'audience doit être rejetée car la preuve de la falsification alléguée n'est pas rapportée (Cass. 2e civ., 17 nov. 1977 : Bull. civ. 1977, II, n° 220, p. 158). Dans le même ordre d'idées, le plumitif d'audience ne saurait remettre en cause l'ordonnance dont le dispositif fait foi jusqu'à inscription de faux (Cass. com., 11 avr. 2012, n° 11-11.406  : JurisData n° 2012-007125 ).

5° Actes du juge 

29. – Catégories d'actes – Les actes du juge peuvent être des actes juridictionnels (a) tels que les jugements, ordonnances ou arrêts, ou de simples constats ayant valeur authentique (b) en raison de leur auteur qui est un magistrat.

a) Actes juridictionnels 

30. – Inscription de faux et annulation – Il est important de ne pas confondre l'annulation d'un jugement pour vice de forme et l'inscription de faux contre une mention d'un jugement. L'annulation résulte de l'omission d'une des formalités prévues par le Code de procédure civile à peine de nullité (CPC, art. 457 à 460 ). L'inscription de faux vise une mention inexacte du jugement et tend à faire rétablir la vérité. Si cette demande aboutit, cela peut entraîner ensuite la nullité du jugement.

 

31. – Intérêt de l'inscription de faux – Le Code de procédure civile a considérablement réduit le champ d'application des causes de nullité du jugement. Ainsi, par ricochet, l'inscription de faux peut devenir inutile. Par exemple, l'alinéa 2 de l'article 458 du Code de procédure civile impose que la nullité pour non-respect des dispositions des règles relatives au prononcé du jugement (CPC, art. 451 et 452 ) soit soulevée au moment du prononcé du jugement "par de simples observations dont il est fait mention au registre d'audience" (CPC, art. 458, al. 2 in fine). De même, l'omission ou l'inexactitude d'une mention ne peut entraîner la nullité s'il est démontré par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été respectées (CPC, art. 459). Ces restrictions apportées au champ de la nullité conduisent à rendre moins attrayante la voie de l'inscription de faux.

 

32. – Mentions du jugement faisant foi jusqu'à inscription de faux –Un jugement ne fait foi jusqu'à inscription de faux que des faits que le juge y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même ou comme ayant eu lieu en sa présence (Cass. com., 16 juill. 1980 : Bull. civ. 1980, IV, n° 298). Il a été décidé que les mentions du jugement relatives au nom des juges qui ont délibéré et celles relatives au nom et à la signature du président font foi jusqu'à inscription de faux (Cass. 3e civ., 27 mars 1996 : Bull. civ. 1996, III, n° 89, p. 57 ; JCP G 1996, IV, n° 1200, p. 155  ; Gaz. Pal. 1997, pan. jurispr. p. 7 ; RTD civ. 1996, p. 705, note R. Perrot. – Cass. soc., 13 juill. 1999, n° 97-42.438  :JurisData n° 1999-003216 ). Il en est de même des mentions relatives aux conditions dans lesquelles le jugement a été rendu telles que la comparution des parties, l'audition de leurs représentants (Cass. com., 5 oct. 1976 : Bull. civ. 1976, IV, n° 250, p. 214. – Cass. com., 31 mars 1981 : Bull. civ. 1981, IV, n° 167 ; JCP G 1981, IV, p. 357) ou les déclarations des parties devant le tribunal (Cass. com., 31 mars 1981 : Bull. civ. 1981, IV, n° 167. – Cass. com., 11 févr. 2004 : Bull. civ. 2004, IV, n° 26 ; Defrénois 2004, art. 37946, note P. Théry).

Fait également foi jusqu'à inscription de faux, la mention dans l'arrêt d'une cour d'appel selon laquelle le gérant d'une société partie à l'instance était muni d'un pouvoir spécial (Cass. soc., 3 déc. 1987 : JCP G 1988, IV, p. 52) ou la constatation par la cour d'appel que l'intimé n'a produit aucune justification aux débats (Cass. 2e civ. 9 juill. 1986 : Bull. civ. 1986, II, n° 110, p. 77). Si l'ordonnance attaquée relève que le texte d'une plainte n'a pas été produit aux débats, cette constatation ne peut être contestée que par la voie de l'inscription de faux (Cass. 1re civ., 7 févr. 1990 : JCP G 1990, IV, p. 132). À l'inverse, les énonciations contenant les motifs par lesquelles les juges apprécient souverainement les faits de la cause ne peuvent pas faire l'objet d'une inscription de faux (Cass. ord., rejet Prem. prés. 11 janv. 1979 : Gaz. Pal. 1979, 1, p. 225, note P. Ancel).

b) Procès-verbaux dressés par le juge 

33. – Actes visés – Le juge peut enregistrer des faits comme des témoignages ou des vérifications personnelles dont il dresse procès-verbal par la plume du greffier. Le magistrat peut également constater l'accord des parties par un jugement d'expédient, d'adjudication. Il peut aussi donner acte à une partie de ses dires. Le juge confère authenticité à ces constatations qu'il fait consigner par écrit et celles-ci font foi jusqu'à inscription de faux.

 

34. – Mentions faisant foi jusqu'à inscription de faux – Il en est ainsi du procès-verbal relatant les déclarations d'un témoin dont on prétend qu'elles ont été inexactement rapportées (CA Pau, 15 févr. 1962 : JCP A 1962, IV, p. 4080, note J. A.), ou du procès-verbal mentionnant que le greffier a assisté à l'enquête si l'on veut prouver qu'en réalité il n'y était pas (Cass. req., 22 déc. 1891 : DP 1892, 1, p. 118). Les mentions faites par le juge dans sa décision au sujet des déclarations des parties qu'il a lui-même recueillies et dont il a donné acte font foi jusqu'à inscription de faux (Cass. soc., 22 nov. 1946 : D. 1947, p. 89. – Cass. soc., 20 avr. 1950 : D. 1951, somm. p. 64 ; S. 1951, 1, 93 ; RTD civ. 1951, p. 429, obs. P. Raynaud. – Pour le donné acte d'un aveu judiciaire, CA Amiens, 1er juill. 1991 : JurisData n° 1991-043760 ). Il en est de même pour la constatation dans un arrêt de l'accord des parties à l'expertise ordonnée (Cass. 2e civ., 2 nov. 1961 : Bull. civ. 1961, II, n° 713) ou encore pour la mention que les parties s'en sont rapportées à justice (Cass. com., 31 mars 1981, préc. supran° 32 ).

35. – Décisions arbitrales – Les arbitres sont amenés à faire dans leur sentence des constatations d'ordre procédural. Ces dernières font foi jusqu'à inscription de faux, même si elles n'ont pas obtenu l'exequatur (Cass. 2e civ., 16 févr. 1972 : D. 1972, p. 477 ; Rev. arb. 1972, p. 125, note J. Rubellin-Devichi. – Cass. 2e civ., 12 déc. 1980 : Rev. arb. 1991, p. 317, note P. Théry). Il s'agit notamment d'une mention constatant à tort, l'acceptation par les parties du report d'un délai (CA Paris, 8 janv. 1970 : JCP G 1970, II, 16400), d'une communication des pièces (CA Paris, 11 juill. 1979 : Gaz. Pal. 1980, 1, somm. p. 88), de l'indication que des documents n'ont pas été versés aux débats, alors qu'ils l'ont été (Cass. 3e civ., 4 juin 1971 : Bull. civ. 1971, III, n° 358, p. 254).

6° Actes des commissaires-priseurs judiciaires 

36. – Actes susceptibles d'inscription de faux – Tous les actes dressés par les commissaires-priseurs judiciaires ne sont pas des actes authentiques. Seuls les procès-verbaux établis dans l'exercice de leur mission ont cette qualité. Sont susceptibles d'inscription de faux, les énonciations que le commissaire-priseur est tenu de vérifier ou de constater par lui-même dans le cadre de ses fonctions. Ainsi, aucune disposition légale ou réglementaire n'imposant au commissaire-priseur de vérifier l'identité de l'acheteur, la mention du nom de ce dernier sur le procès-verbal de vente établi par l'officier ministériel ne vaut pas jusqu'à inscription de faux et est susceptible de preuve contraire (Cass. 1re civ., 10 févr. 1998 : Bull. civ. 1998, I, n° 54, p. 35 ; JCP G 1998, IV, p. 618 ; D. 1998, p. 64).

 

37. – Actes n'ayant pas la qualité d'acte authentique – Le procès-verbal établi par le commissaire-priseur judiciaire alors qu'il ne fait que diriger une vente organisée par une société privée de ventes volontaires aux enchères publiques n'a pas la qualité d'acte authentique et ne peut, en conséquence, pas faire l'objet d'une inscription de faux (Cass. com, 19 déc. 2006 : Bull. civ. 2006, IV, n° 270, p. 293 ; D. 2007, p. 626, note L. Mauger-Vielpeau ; Gaz. Pal. 2007, p. 4, rapp. A. Potocki).

7° Rapports d'expert judiciaire 

38. – Qualification du rapport d'expertise – Le rapport établi par un expert judiciaire, même missionné par le juge, n'est pas un acte authentique. En conséquence, il ne peut être l'objet d'une procédure d'inscription de faux. Dans un arrêt du 19 janvier 1999, la Cour de cassation l'énonce clairement en précisant "qu'un rapport d'expertise judiciaire n'est pas un acte authentique" (Cass. 1re civ., 13 janv. 1998, n° 96-14.239  : JurisData n° 1998-000257 . – Cass. 1re civ., 19 janv. 1999 : Bull. civ. 1999, I, n° 22, p. 15). Cette solution est logique puisque le juge ne peut être lié par les constatations et les conclusions d'un technicien qu'il a désigné ainsi que le rappelle l'article 246 du Code de procédure civile .

C. - Rapport entre le faux civil et le faux pénal 

39. – Le faux, infraction pénale – Aux termes de l'article 441-4 du Code pénal , le faux constitue une infraction pénale. Lorsqu'il est commis par toute personne, la peine encourue est de dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende. Si l'auteur du faux est dépositaire de l'autorité publique, autrement dit lorsque l'auteur du faux est l'officier public lui-même, la peine est de quinze ans de réclusion criminelle et 225 000 euros d'amende. Des poursuites pénales peuvent interférer de ce fait avec la procédure de faux civil. Ces poursuites peuvent être à l'initiative du ministère public ou de la victime ayant déposé plainte avec constitution de partie civile. Il est alors nécessaire de déterminer les frontières entre les deux instances qui demeurent indépendantes l'une de l'autre (1°) et d'envisager leurs incidences réciproques à travers le sursis à statuer du juge civil (2°) et ses exceptions (3°).

1° Indépendance de l'action civile et de l'action pénale 

40. – Objet de l'action – Le faux civil a pour objet de faire reconnaître la fausseté d'un document et non pas de rechercher la personne qui s'est rendue coupable de la falsification. À l'inverse, le but de la procédure pénale est de découvrir et de punir l'auteur du faux. Autrement dit, la procédure civile de faux est dirigée contre la pièce alors que la procédure pénale l'est à l'encontre de l'auteur du faux. Même si le plus souvent, ce dernier intervient volontairement ou est appelé en cause, l'instance civile peut se dérouler hors sa présence puisque l'action est dirigée contre la partie qui souhaite faire usage du faux document.

41. – Indépendance des deux actions – Il existe une certaine indépendance des deux actions. Ainsi, la procédure de faux civil peut être engagée alors même que le fait matériel de falsification ne serait pas ou ne serait plus susceptible de donner lieu à des poursuites criminelles (CA Limoges, 15 janv. 1900 : Journ. avoués 1901, p. 366). Si le fait incriminé au pénal n'a pas encore donné lieu à des poursuites, le juge civil peut recevoir la demande en inscription de faux et peut statuer sur cette demande (Cass. req., 5 mars 1867 : DP 1868, 1, p. 70).

À l'inverse, lorsque la pièce falsifiée est retirée par la partie qui souhaitait l'utiliser, la procédure de faux incident est close mais l'action publique peut être menée devant la juridiction répressive. Il en est de même si la partie qui détient la pièce a été sommée de déclarer si elle entend ou non s'en servir et si elle a donné une réponse négative. Dans ce cas, il est toujours possible de déposer une plainte contre celui que l'on prétend être l'auteur du faux. Dans le même ordre d'idées, si la demande d'inscription de faux est rejetée en raison d'une irrégularité de procédure, le demandeur a toujours la possibilité de choisir la voie pénale pour faire établir l'existence du faux tant qu'il n'y a pas prescription.

2° Sursis à statuer du juge civil 

42. – Ancien Code de procédure civile – L'ancien article 250 du Code de procédure civile permettait au demandeur en faux incident d'intenter également une action en faux principal devant la juridiction pénale si le ministère public ne prend pas l'initiative de l'action publique. Autrement dit, le demandeur en faux civil bénéficiait d'une option : persister dans la voie civile ou l'abandonner pour la voie répressive (E. Glasson, P. Colmet-Daage, Précis théorique et pratique de procédure civile, t. 1, 2e éd. par A. Tissier : LGDJ 1908, n° 751, p. 803).

 

43. – Code de procédure civile – Le Code de procédure civile n'a pas maintenu la règle édictée par l'ancien article 250. Il faut donc en revenir au droit commun selon lequel lorsque le demandeur a choisi la voie civile, il ne peut plus intenter une action devant la juridiction pénale. Il s'agit de l'application de la règle "electa una via, non datur recursus ad alteram" consacrée par l'article 5 du Code de procédure pénale .

 

44. – Le criminel tient le civil en l'état – La coexistence d'une action civile et d'une action pénale ne peut résulter que de poursuites engagées par le ministère public parallèlement à une instance civile en cours. Dans ce cas, en application de l'article 312 du Code de procédure civile "il est sursis au jugement civil jusqu'à ce qu'il ait été statué au pénal". Ce n'est là qu'une application particulière du principe général posé par l'article 4 du Code de procédure pénale selon lequel le criminel tient le civil en l'état.

 

45. – Reprise de l'instance civile – Après la décision de sursis à statuer prononcée par le juge civil, l'instance civile ne peut être reprise qu'après qu'une décision ait été prononcée : soit une ordonnance de non-lieu, soit une décision définitive acquittant ou condamnant l'auteur présumé du faux.

 

46. – Ordonnance de non-lieu ou d'acquittement – En présence d'une ordonnance de non-lieu ou d'acquittement, le juge civil conserve toute latitude pour apprécier la fausseté de la pièce sous réserve que la décision pénale ne soit pas fondée sur la vérité de l'acte prétendu faux. Si la décision repose sur l'insuffisance de preuve, ou sur l'absence d'intention coupable ou encore s'il y a prescription de l'action, il n'existerait pas de contradiction entre la décision du juge civil et celle du juge répressif. L'autorité de la chose jugée au pénal ne s'opposerait pas à la constatation du caractère falsifié de l'acte devant la juridiction civile (Cass. req., 29 avr. 1874 : DP 1874, 1, p. 333. – Cass. crim., 25 juin 1881 : DP 1881, 1, p. 444. – Cass. crim., 14 janv. 1888 : DP 1888, 1, p. 399).

 

47. – Décision se prononçant formellement sur la fausseté de l'acte – Mais, si le juge pénal s'est formellement prononcé sur la fausseté de l'acte et a constaté par une décision définitive la vérité ou la falsification de la pièce, le tribunal civil est tenu de suivre la décision du juge répressif. Il en est ainsi, même si les parties en cause au procès civil n'étaient pas présentes ou représentées à l'instance pénale. Il est, en effet, possible que le faux ne soit pas l'œuvre du défenseur à l'inscription de faux qui est de bonne foi et qui n'a pas été mis en cause pénalement.

 

48. – Effet sur l'exécution de l'acte authentique – Selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 1319 du Code civil  :

(...) en cas de plainte en faux principal, l'exécution de l'acte argué de faux sera suspendue par la mise en accusation ; et en cas d'inscription de faux faite incidemment, les tribunaux pourront, suivant les circonstances, suspendre provisoirement l'exécution de l'acte.

En d'autres termes, la plainte en faux entraîne automatiquement la suspension de l'exécution à compter de la mise en accusation alors que dans le cas du faux incident civil, le juge conserve un pouvoir d'appréciation en opportunité quant à l'exécution de l'acte.

3° Exceptions au sursis à statuer 

49. – Inutilité de la pièce arguée de faux – En dépit de l'ouverture de poursuites pénales, le juge civil n'est pas tenu de surseoir à statuer s'il estime que le procès peut être jugé sans tenir compte de la pièce arguée de faux (CPC, art. 312 et 313, al. 1er ). C'est une solution ancienne et constante qui reprend une règle générale selon laquelle le déroulement du procès principal ne doit pas être retardé lorsque l'acte prétendu faux n'a pas d'incidence sur la solution du procès (Cass. req., 11 juin 1845 : DP 1845, 1, p. 368. – CA Pau, 3 déc. 1856 : DP 1857, 2, p. 58).

 

50. – Renonciation ou transaction sur le faux – Si les parties ont consenti une renonciation ou une transaction sur le faux, l'article 311 du Code de procédure civile permet au ministère public de "requérir toutes les mesures propres à réserver l'exercice de poursuites pénales".Le magistrat du parquet peut ainsi demander une mesure de séquestre de l'acte litigieux afin d'éviter qu'il ne disparaisse. La fin de l'instance civile par la volonté des parties ne doit pas empêcher les poursuites pénales.

 

51. – Juge pouvant prononcer un sursis à statuer – L'article 312 du Code de procédure civile a vocation à s'appliquer à l'inscription de faux soulevée à titre incident devant le tribunal de grande instance ou la cour d'appel. Dans un arrêt du 18 février 1999, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a décidé que ce texte n'était pas applicable devant le juge de l'exécution (Cass. 2e civ., 18 févr. 1999 : Bull. civ. 1999, II, n° 35, p. 24 ; D. 1999, somm. p. 220, obs. P. Julien ;JCP G 1999, II, 10139 , note E. du Rusquec. – dans le même sens, Cass. 1re civ., 28 mars 2008 : JurisData n° 2008-043385 ).

II. - Acte d'inscription de faux 

52. – Présentation – La procédure d'inscription de faux est particulièrement grave et nécessite un acte préalable d'inscription de faux (A) dont la forme et le contenu sont déterminés précisément (B).

A. - Préalable de l'inscription de faux 

53. – Déclaration d'inscription de faux – Qu'il s'agisse d'un faux incident ou d'un faux principal, la procédure est nécessairement précédée d'un acte par lequel le demandeur déclare s'inscrire en faux contre un acte authentique. Cette déclaration met en évidence la gravité de la démarche. L'acte d'inscription de faux donne son nom à la procédure qui lui est spécifique. Elle n'a vocation à s'appliquer qu'aux seuls actes authentiques et la demande est irrecevable en l'absence d'un tel acte.

 

54. – Juridiction compétente – L'acte d'inscription de faux est déposé aux greffes du tribunal de grande instance ou de la cour d'appel qui ont une compétence exclusive en la matière en application de l'article 286 du Code de procédure civile . Si l'incident de faux se produit devant une juridiction d'exception, cette dernière est tenue de surseoir à statuer sur l'action principale jusqu'à ce que le jugement sur le faux soit rendu sauf si elle peut statuer sans tenir compte de la pièce litigieuse (CPC, art. 313 ). La cour d'appel est compétente si l'incident de faux est soulevé au niveau du second degré de juridiction en raison de sa plénitude de juridiction. Il n'est pas nécessaire de revenir devant le tribunal de grande instance. Le jugement rendu par le tribunal de grande instance saisi de la question préjudicielle peut faire l'objet d'un appel et dans ce cas, le sursis à statuer de la juridiction d'exception perdure jusqu'à ce que la cour ait statué sur l'appel. L'incident peut être soulevé pour la première fois devant la Cour de cassation. Celle-ci en connaît selon une procédure particulière prévue aux articles 1028 à 1031 du Code de procédure civile (V. infran° 94 à 104 ). Enfin, la demande principale en faux est nécessairement introduite devant le tribunal de grande instance dont le jugement est susceptible d'appel.

B. - Forme et contenu de l'acte d'inscription de faux 

55. – Forme de l'acte d'inscription de faux – La demande d'inscription de faux est formalisée dans un acte remis au greffe du tribunal de grande instance ou de la cour d'appel par la partie elle-même ou son mandataire. En règle générale, le mandataire est l'avocat. Il doit être muni d'un pouvoir spécial exprès, et ce, à peine de nullité. En effet, l'article 417 du Code de procédure civile selon lequel"la personne investie d'un mandat de représentation en justice est réputée, à l'égard du juge et de la partie adverse, avoir reçu pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d'acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement", n'est pas applicable. Une déclaration contenue dans des conclusions ne peut remplacer l'acte de déclaration d'inscription de faux. Le dépôt de l'acte daté et signé par le greffier a la nature d'un acte authentique.

 

56. – Contenu de l'acte d'inscription de faux – L'acte d'inscription de faux doit mentionner avec précision les moyens que la partie invoque pour établir le faux. Une simple énonciation globale serait insuffisante. S'il s'agit d'un faux matériel, le demandeur doit, par exemple, préciser en quoi consiste le faux : raturage, grattage, surcharge... En cas de faux intellectuel, il faut détailler les faits qui tendent à établir la fausseté des énonciations contenues dans l'acte litigieux (Cass. 1re civ., 19 déc. 2006 : Bull. civ. 2006, I, n° 555, p. 495 ; AJDI 2007, p. 322 ; Procédures 2007, comm. 149 , note F. Vinckel. – Cass. 1re civ., 29 juin 2011, n° 10-19.177 . – Cass. 2e civ., 16 mai 2012, n° 09-71.793 ). Cette énonciation de moyens est cependant indicative puisque la partie peut présenter des moyens additionnels et le juge peut en relever d'office. Les suites données à l'inscription de faux varient selon qu'il s'agit d'un faux incident ou à titre principal et de la juridiction saisie.

III. - Procédures de l'inscription de faux 

57. – Diversité de procédures – La procédure de droit commun à titre incident se déroule devant le tribunal de grande instance ou la cour d'appel (A). Il faut également envisager la procédure devant une juridiction d'exception (B) ainsi que la procédure de faux à titre principal (C) pour terminer par la procédure devant la Cour de cassation (D).

A. - Procédure de faux incident devant le tribunal de grande instance ou la cour d'appel 

58. – Présentation – La procédure de faux à titre incident suppose la dénonciation de l'acte d'inscription de faux au défendeur (1°) et l'instruction de la demande (2°) avant que le jugement puisse être prononcé (4°). En raison de sa gravité, toute inscription de faux doit être communiqué au ministère public (3°).

1° Dénonciation de l'acte d'inscription de faux au défendeur 

59. – Dépôt de l'acte d'inscription de faux – L'acte d'inscription de faux est établi en deux exemplaires. Aux termes de l'article 306 du Code de procédure civile , l'un est versé immédiatement au dossier, l'autre est remis au demandeur. C'est le juge saisi du principal qui statuera sur l'incident de faux. Le demandeur est tenu de dénoncer l'acte d'inscription à son adversaire par notification entre avocats ou signification dans un délai d'un mois à compter de l'inscription (Cass. 2e civ., 25 mai 2000, n° 98-20.320  : JurisData n° 2000-002425 ). Le pouvoir spécial exigé par l'article 306 doit être joint à la déclaration d'inscription de faux à peine d'irrecevabilité de la demande. La production dudit pouvoir en cours d'instance ne peut couvrir cette irrecevabilité (Cass. 2e civ., 13 juill. 1999, n° 97-12.116  : JurisData n° 1999-002927  ; Bull. civ. 1999, II, n° 135, p. 95 ; Procédures 1999, comm. 245 , obs. R. Perrot).

 

60. – Sanction – L'article 306 du Code de procédure civile ne précise pas la sanction de l'inobservation du délai d'un mois. Cependant, le demandeur a tout intérêt à dénoncer au plus vite l'incident à son adversaire afin d'éviter que l'instance principale se poursuive. La Cour de cassation a décidé que ce délai d'un mois est prescrit à peine de caducité. Le juge peut dans ce cas statuer sur la demande sans tenir compte de la contestation relative à cet acte (Cass. 2e civ., 26 nov. 1998, n° 96-14.212  : JurisData n° 1998-004655  ; Procédures 2000, comm. 213 , obs. J. Junillon. – Cass. 2e civ., 13 juill. 1999, préc. n° 59. – Cass. 2e civ., 19 févr. 2009 : JurisData n° 2009-047145 ). Lorsque l'incident est soulevé devant une juridiction d'exception, la sanction est la nullité (V. infra n° 81 ).

 

61. – Retrait de la pièce litigieuse des débats – Il faut noter que le demandeur à l'incident n'est pas tenu de faire sommation à son adversaire de déclarer s'il entend, ou non, se prévaloir de l'acte litigieux contrairement à ce qui se passe lors d'une action en faux à titre principal (V. infra n° 85 à 93 ) ou lors d'un incident devant une juridiction d'exception (V. infra n° 78 à 84 ). Une telle exigence a pu paraître inutile au législateur puisque la pièce a été versée aux débats ce qui a déclenché l'incident et ce qui semble être révélateur de la volonté d'utiliser la pièce. Toutefois, la partie ayant produit la pièce dispose toujours de la faculté de la retirer des débats ce qui rendra l'inscription de faux sans objet.

2° Instruction de la demande 

62. – Déroulement de la procédure – La procédure d'incident se déroule devant le tribunal de grande instance ou la cour d'appel suivant les formes ordinaires. Le juge a le choix entre trois solutions.

 

63. – Inutilité de l'acte – Il est possible que le juge puisse se prononcer sur le fond de l'affaire principale sans tenir compte de la pièce prétendue fausse. Dans cette hypothèse, l'alinéa 1er de l'article 307 du Code de procédure civile lui permet de rendre sa décision sans avoir à se prononcer sur le faux (Cass. 1re civ., 7 juin 1978 : Gaz. Pal. 1978, 2, somm. p. 337. – Cass. crim., 7 mars 1996, n° 94-84.553  : JurisData n° 1996-001813 ).

 

64. – Pièce relative à certains chefs de la demande – Si la pièce prétendue fausse n'est relative qu'à certains chefs de la demande pouvant être détachés et réservés, le juge peut statuer sur les autres chefs de la demande sans attendre que l'incident de faux soit réglé(CPC, art. 307, al. 2 ).

 

65. – Pièce nécessaire à la solution de l'ensemble de l'affaire principale – Si la pièce est indispensable à la résolution de l'ensemble de l'instance principale, le juge devra statuer préalablement sur le faux avant la demande principale. Les articles 308 et 309 du Code de procédure civile renvoient à la procédure de vérification d'écriture (V.JCl. Procédure civile, Fasc. 624 ). Dans ce cas, le magistrat statue d'abord sur l'incident de faux par un jugement séparé avant de statuer sur le fond.

 

66. – Conviction immédiate du juge – Il peut arriver que le juge forge sa conviction immédiatement "au vu des éléments dont il dispose" (CPC, art. 380, al. 1er ) sans mesure d'instruction. Il y a des cas où la fausseté de l'acte est évidente. À l'inverse, le juge peut rejeter immédiatement l'allégation de faux si celle-ci lui paraît sans fondement et relever de la pure chicane (Cass. 2e civ., 17 nov. 1977 : Bull. civ. 1977, II, n° 220, p. 158. – Cass. 2e civ., 7 juin 1978 : Gaz. Pal. 1978, 2, somm. p. 337). L'appréciation du juge du fond est souveraine dans ce cas (Cass. 2e civ., 17 nov. 1977, préc.).

 

67. – Mesures d'instruction – Le plus souvent, le tribunal a recours à une mesure d'instruction telle que l'enquête, l'expertise ou la comparution personnelle des parties. Le Code de procédure civile assimile l'instruction du faux à l'encontre des actes authentiques à celle de la vérification des écritures privées en application de l'alinéa 1er de l'article 308. Cependant, cette assimilation de principe laisse subsister un certain nombre d'adaptations en ce qui concerne les modalités de l'instruction.

 

68. – Pouvoirs du juge – Le juge n'est pas lié par les moyens articulés par les parties et il peut relever tout moyen d'office (CPC, art. 309 ) qu'il soit de droit ou de fait. Ainsi, le juge dispose des plus larges pouvoirs pour se forger une conviction sur la fausseté de la pièce.

 

69. – Enquête – La fausseté de l'acte peut être établie par témoins suivant la forme ordinaire des enquêtes. Le juge peut notamment entendre les témoins instrumentaires d'un acte notarié comme un testament authentique ou ceux d'un acte de mariage dressé par l'officier de l'état civil. En refusant d'accueillir la demande d'inscription de faux à l'encontre d'un testament authentique alors que le témoin instrumentaire avait déclaré que la testatrice se contentait de répéter les phrases lues par le notaire sans les lui dicter, les juges du fond ont violé les articles 971 et 972 du Code civil (Cass. 1re civ., 29 juin 2011, n° 10-17.168  : JurisData n° 2011-012929  ; Paygo-locked-purchase ImageJCP N 2011, 1257 , obs. G. Rivière ; Paygo-locked-purchase ImageJCP N 2011, 1234 , obs. F. Hébert ; AJF 2011, p. 501). En application de l'article 304 du Code de procédure civile , l'officier public ayant dressé l'acte peut être entendu comme témoin s'il n'est pas partie à l'instance. S'il a cette qualité, le tribunal peut ordonner sa comparution personnelle.

 

70. – Expertise – Les règles de l'expertise en matière de faux sont les mêmes que celles de la vérification d'écriture. Le juge choisit librement le ou les expert(s). L'expertise obéit au droit commun desarticles 143 à 178 et 232 à 284 du Code de procédure civile . Quand il s'agit d'un faux matériel, l'expert peut faire porter ses investigations sur des pièces de comparaison dont le choix est laissé à la discrétion du juge (Cass. 2e civ., 21 janv. 1998, n° 95-20.197). À défaut de désigner un expert, le juge peut lui-même se livrer à la comparaison des documents. Cependant, il est impossible de solliciter, à titre préventif, une mesure d'expertise préalablement à une procédure d'inscription de faux dès lors qu'il s'agit de mettre en cause la force probante d'un acte authentique (Cass. 1re civ., 11 juin 2003, n° 00-11.931  : JurisData n° 2003-019368  ; Bull. civ. 2003, I, n° 139, p. 109 ; D. 2004, p. 830, note F. Auberson ; RTD civ. 2003, p. 503, note J. Mestre ; RTD civ. 2003, p. 539, note J. Normand).

 

71. – Aveu judiciaire – Certains auteurs (E. Glasson, A. Tissier et R. Morel, Traité théorique et pratique d'organisation judiciaire, de compétence et de procédure civile : t. 2, 3e éd., Sirey 1926, n° 642, p. 750 et 751) ont pu douter que l'aveu soit recevable comme preuve de la fausseté ou de la véracité d'un acte authentique au motif que la sincérité d'un tel acte intéresse l'ordre public. Cependant, cette opinion apparaît infondée puisque ce qui intéresse l'ordre public, c'est le faux en tant qu'infraction pénale. La reconnaissance du faux portant sur une obligation civile concerne les rapports privés où les parties sont maîtresses de leurs droits. L'article 311 du Code de procédure civile autorise d'ailleurs les parties à transiger sur l'inscription de faux. À l'inverse, l'aveu judiciaire peut également permettre de retenir la véracité de l'acte authentique. C'est ce qu'a décidé la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 14 octobre 2010(Cass. 2e civ., 14 oct. 2010, n° 09-69.002 ). Dans cette affaire, une femme s'était inscrite en faux contre un acte authentique constatant son engagement de caution. La cour d'appel a déclaré cette inscription de faux irrecevable aux motifs que la demanderesse avait reconnu en première instance ses engagements et ne déniait pas avoir signé l'acte. La Cour de cassation rappelle que ces énonciations faites devant le juge de première instance constituent un aveu judiciaire qui ne pourrait être révoqué que par une erreur de fait dont la preuve n'était pas rapportée.

3° Communication au ministère public 

72. – Communication obligatoire – Contrairement aux demandes de vérification d'écritures privées, toute inscription de faux à l'encontre d'un acte authentique, à titre incident ou à titre principal, doit être communiquée au ministère public aux termes de l'article 303 du Code de procédure civile . Cette formalité d'ordre public se justifie par la gravité d'une telle contestation qui met en cause la crédibilité d'un acte public susceptible d'entraîner des poursuites criminelles (Cass. 1re civ., 18 oct. 1994, n° 92-17.222  : JurisData n° 1994-001987 . –Cass. 2e civ., 24 sept. 1997, n° 94-11.431  : JurisData n° 1997-003808. – Cass. com., 12 mars 2002 : Bull. civ. 2002, IV, n° 54, p. 55. – Cass. 1re civ., 6 oct. 2011, n° 10-23.520, 914  : JurisData n° 2011-021299 ). Le ministère public intervient en cas de transaction entre les parties privées afin que la transaction ne conduise pas à faire disparaître les traces d'un faux criminel et ne permette au coupable d'échapper aux sanctions pénales. Le procureur peut notamment demander la mise sous séquestre de l'acte argué de faux. Il en est de même en cas de désistement du demandeur en faux.

Note de la rédaction – Mise à jour du 21/01/2014

72 . - La communication au ministère public est faite à la diligence du juge

L'inscription de faux contre un acte authentique donne lieu à communication au ministère public qui est, sauf disposition particulière, faite à la diligence du juge ( Cass. 1re civ., 27 nov. 2013, n° 12-22.860  : JurisData n° 2013-027334 ).

4° Le jugement et ses conséquences 

73. – Appel du jugement – Le jugement qui statue sur une inscription de faux présente les caractères d'un jugement contentieux sur le fond ayant l'autorité de la chose jugée. Il peut faire l'objet d'un appel indépendamment du jugement statuant sur le principal. Dans le cas d'un faux soulevé à titre incident, il est admis que le taux de ressort s'apprécie en fonction du montant de la demande principale (CA Lyon, 28 juin 1951 : D. 1951, p. 746).

 

74. – Le jugement déclare la pièce fausse – La pièce déclarée fausse perd sa force probante. Comme il s'agit d'un acte authentique, elle perd également sa force exécutoire. De plus, le Code de procédure civile prend un certain nombre de dispositions afin de neutraliser l'acte pour l'avenir. Ainsi, l'article 310 de ce code ordonne que le jugement déclarant le faux soit mentionné en marge de l'acte et que celui-ci soit réintégré dans les minutes d'où il avait été extrait ou conservé au greffe. Le choix entre ces deux solutions doit être précisé dans le jugement même. Ces mesures ne sont prises qu'après que le jugement est passé en force de chose jugée ou que la partie condamnée y a acquiescé. Il en résulte que le pourvoi en cassation n'est pas suspensif.

 

75. – Le jugement rejette l'inscription de faux – Si l'inscription de faux a été rejetée, l'acte conserve sa force probante et exécutoire avec une autorité accrue provenant de l'autorité de la chose jugée. Toutefois, cette autorité n'est relative qu'aux parties à l'instance (C. civ., art. 1351 ). Elle s'oppose à ce que la sincérité de l'acte soit remise en cause entre les parties. Un nouveau moyen de faux ne saurait être assimilé à une cause différente mais elle ne s'oppose pas à ce que l'acte soit à nouveau contesté par un tiers auquel il serait ultérieurement opposé.

 

76. – Amende civile – En application de l'article 305 du Code de procédure civile , le demandeur en faux qui succombe est condamné à une amende civile "d'un maximum de 3 000 euros". La condamnation à l'amende est obligatoire pour le juge. Toutefois, l'amende ne peut être due dans le cas d'un désistement volontaire du demandeur en faux ou en l'absence de dénonciation de l'inscription de faux dans le délai d'un mois puisque dans ces hypothèses, il n'y a pas succombance.

 

77. – Dommages-intérêts – Les dommages-intérêts sont réclamés par la partie adverse à qui le faux a été opposé. La condamnation doit être fondée sur les principes généraux de la responsabilité civile : il faut un préjudice de la partie au profit de laquelle la condamnation est prononcée comme conséquence directe d'une faute de l'autre partie. Le préjudice peut consister dans le retard subi par l'instance principale ou l'atteinte à l'honneur et à la considération du défendeur accusé d'avoir commis ou d'avoir fait usage d'un document falsifié. La faute pour le demandeur consiste à avoir suscité l'incident de faux par pure chicane ou par simple légèreté (Cass. 1re civ., 31 mai 1949 : JCP G 1949, IV, p. 109 ; Bull. civ. 1949, I, n° 194). Des dommages-intérêts peuvent être attribués non seulement au défendeur mais également à l'officier public ayant reçu l'acte argué de faux si celui-ci est intervenu dans la procédure et a pris des conclusions à cet effet. La réparation du préjudice peut aussi consister dans la publication dans la presse du jugement ayant rejeté l'inscription de faux. Le défendeur à l'inscription de faux qui a succombé lorsque le faux est établi peut aussi être condamné à payer des dommages-intérêts à son adversaire sur le fondement de l'article 1382 du Code civil . La faute consiste à avoir produit en connaissance de cause une pièce fausse et le préjudice à avoir subi un procès fondé sur une fausse pièce.

B. - Procédure de faux incident devant une juridiction d'exception 

78. – Incompétence de la juridiction d'exception – La procédure d'inscription de faux relève de la compétence exclusive des juridictions de droit commun. Ainsi, la juridiction d'exception n'est pas compétente pour connaître de la demande d'inscription de faux. Cette dernière va être portée comme question préjudicielle devant le tribunal de grande instance.

 

79. – Allégation de faux – Le faux est allégué devant la juridiction saisie de l'action principale dans les formes propres à la procédure suivie devant cette juridiction : conclusions ou déclaration orale. Cette allégation est accompagnée d'une demande de sursis à statuer pour permettre de saisir le tribunal de grande instance.

 

80. – Exception au sursis à statuer – La juridiction d'exception n'est pas toujours tenue de surseoir à statuer. Elle peut, notamment, passer outre en écartant des débats la pièce litigieuse quand elle peut statuer sans en tenir compte en application de l'alinéa 1er de l'article 313 du Code de procédure civile . De même, il est possible d'appliquer le deuxième alinéa de l'article 307 de ce code lorsque l'acte litigieux ne concerne qu'un des chefs de la demande et statuer sur les autres chefs. Mais la juridiction d'exception ne peut apprécier le sérieux de l'allégation de faux. Elle est tenue de surseoir à statuer dès lors que la pièce arguée de faux peut avoir une incidence sur la décision, c'est-à-dire quand les conditions d'existence d'une question préjudicielle sont réunies.

 

81. – Acte d'inscription de faux – Dans le mois qui suit la décision de surseoir à statuer, l'acte d'inscription de faux doit être remis au greffe du tribunal de grande instance. À défaut, l'incident n'est pas pris en considération et l'acte litigieux est réputé reconnu entre les parties.

 

82. – Procédure – L'article 313 du Code de procédure civile renvoie pour la suite de la procédure à celle de l'inscription de faux à titre principal (V. infra n° 85 à 93 ). L'action est introduite devant le tribunal de grande instance par une assignation. Celle-ci doit intervenir dans le mois de l'inscription de faux. À défaut de respecter ce délai, l'inscription est frappée de caducité. Ces deux délais successifs d'un mois empêchent que l'incident ne retarde trop la solution de l'instance principale. Une copie de l'acte d'inscription doit être jointe à l'assignation selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 314 du Code de procédure civile .

 

83. – Compétence territoriale – Le Code de procédure civile n'indique pas le tribunal de grande instance territorialement compétent. Il est possible d'hésiter entre le tribunal du lieu du défendeur à l'incident conformément au droit commun ou celui du ressort duquel se trouve la juridiction devant laquelle l'incident a été soulevé. À défaut de disposition spéciale, la première solution apparaît comme la plus rationnelle.

 

84. – Résolution de la question préjudicielle – Comme la procédure suivie est celle de l'inscription de faux à titre principal, l'assignation doit contenir une sommation pour le défendeur de déclarer s'il entend ou on utiliser l'acte prétendu faux. Les effets de la réponse donnée à cette sommation obéissent aux règles de l'inscription principale (V. infra n° 85 à 93 ). Dans ce cas, l'utilité de cette sommation peut être discutée puisque si la partie a produit la pièce dans l'instance principale devant la juridiction principale, c'est qu'elle entend s'en servir. Afin de statuer sur le faux, la procédure suivie devant le tribunal de grande instance est la procédure ordinaire propre à cette juridiction. Les moyens de preuves et le pouvoir d'appréciation du tribunal sont les mêmes que dans le cas du faux incident. Le jugement produit les mêmes effets et obéit aux mêmes règles que le jugement rendu en matière de faux incident (V. supra n° 73 à 77 ).

C. - Inscription de faux à titre principal 

85. – Compétence – L'action principale en faux contre un acte authentique est une innovation du décret du 17 décembre 1973 intégré aux articles 314, 315 et 316 du Code de procédure civile . Le tribunal de grande instance bénéficie d'une compétence exclusive pour connaître de cette action selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 286 du Code de procédure civile . Le tribunal territorialement compétent est celui du domicile du défendeur en application de la règle générale de l'article 42 du Code de procédure civile .

 

86. – Défendeur – L'action principale en faux ne survient pas lors d'un procès dans lequel une partie produit une pièce que son adversaire argue de faux. Il s'agit d'une action préventive qui est faite à l'acte plutôt qu'à une personne déterminée. Cependant, il faut nécessairement un défendeur. Le demandeur qui prend l'initiative de l'action peut choisir comme défendeur une personne susceptible de se prévaloir de l'acte comme par exemple le bénéficiaire d'un testament. Ce défendeur n'est pourtant qu'éventuel puisqu'il sera sommé de déclarer s'il entend, ou non, utiliser l'acte litigieux.

 

87. – Introduction de la demande – La demande doit être précédée d'un acte d'inscription de faux comme en matière de faux incident (V. supra n° 53 à 56 ). L'assignation doit être faite dans le mois qui suit cet acte d'inscription de faux sous peine de caducité. La copie de cet acte doit être jointe à l'assignation. L'absence de notification de l'acte d'inscription de faux au défendeur constitue une cause de nullité de l'acte d'assignation pour vice de forme. Cette annulation n'est cependant prononcée que si le vice cause un grief au requis. L'assignation qui ne serait pas précédée d'une inscription de faux serait irrecevable car l'action ne peut être introduite que par l'inscription de faux.

 

88. – Sommation du défendeur – L'assignation contient une sommation faite au défendeur de déclarer s'il entend ou non se servir de l'acte litigieux. Comme il s'agit d'une action préventive, elle devient inutile si la personne contre laquelle elle est dirigée n'entend pas se prévaloir de l'acte prétendu faux. Dans ce cas, le tribunal donne acte au demandeur de la réponse négative du défendeur et l'instance s'arrête là. Désormais, le défendeur ne peut plus se prévaloir de l'acte à l'encontre de son adversaire. Cependant, cette renonciation n'engage que celui dont elle émane et une autre personne pourrait se prévaloir de la pièce. Il faut alors que le demandeur reprenne l'action à l'encontre de celui qui souhaite utiliser l'acte.

 

89. – Forme de la réponse du défendeur – La réponse du défendeur se fait par conclusions à défaut de précision des textes. Aucun délai n'est prévu. Ainsi, cette réponse peut être donnée à tout moment de la procédure jusqu'à l'ordonnance de clôture. Le juge de la mise en état pourrait intervenir afin de fixer un délai.

 

90. – Le défendeur déclare vouloir se servir de l'acte litigieux – Si le défendeur déclare vouloir utiliser l'acte prétendu faux, la procédure se poursuit comme en matière de vérification d'écritures et de faux incident ; l'article 316 du Code de procédure civile procédant par renvoi.

 

91. – Défaut de comparution du défendeur – Si le défendeur ne comparaît pas, sa défaillance est assimilée à une réponse positive, même si l'assignation n'a pas été délivrée à personne. La procédure continue en son absence. Le jugement rendu sera réputé contradictoire. Le tribunal peut aussi ordonner que le défendeur soit à nouveau assigné.

 

92. – Actes visés – Il résulte de la combinaison des articles 300 et 395 du Code de procédure civile qu'une demande de faux peut être formée à titre principal même si elle vise un écrit déjà produit en justice et contre lequel un incident de faux n'a pas été élevé (Cass. 2e civ., 10 juill. 1996 : Bull. civ. 1996, II, n° 203, p. 123 ; JCP G 1996, IV, 2081  ; D. 1996, inf. rap. p. 218 ; D. 1996, somm. p. 349, obs. P. Julien ; RTD civ. 1996, p. 984, obs. R. Perrot).

 

93. – Établissement du faux – Les modes d'établissement du faux se font de manière identique que dans la procédure de faux incident (V. supra n° 62 à 71 ). Le jugement sur le faux produit les mêmes effets que ceux produits par le jugement de faux incident (V. supra n° 73 à 77 ).

D. - Incident de faux soulevé devant la Cour de cassation 

94. – Présentation – Depuis le décret n° 79-941 du 7 novembre 1979portant réforme de la procédure en matière civile devant la Cour de cassation (JO 9 nov. 1979, p. 2775), les articles 1028 à 1031 du Code de procédure civile prévoient une procédure spécifique à la demande en faux devant la Cour de cassation. Ces textes dérogent aux articles 299 à 316 du même code relatifs à l'inscription de faux devant les autres juridictions. Seules certaines pièces peuvent être arguées de faux devant la Haute juridiction (1°) et selon une procédure particulière (2°).

1° Pièces pouvant être arguées de faux devant la Cour de cassation 

95. – Pièce nouvelle – Aucune pièce nouvelle, qui n'a pas été produite devant le juge du fond, ne peut être produite devant la Cour de cassation. En effet, le moyen fondé sur des pièces nouvelles est nouveau et comme tel irrecevable. Mais, le faux des pièces déjà produites devant le juge du fond aurait dû être porté devant ce juge. Il constituerait devant la Cour de cassation un moyen nouveau, donc irrecevable (Cass. req., 29 nov. 1852 : DP 1853, 1, p. 301). Si la fausseté de la pièce n'a été révélée à la partie que postérieurement à la décision en dernier ressort rendue par la juridiction du fond, la voie de recours est celle du recours en révision et non pas celle du pourvoi en cassation (Cass. soc., 29 sept. 1988 : Gaz. Pal. 1989, 1, somm. p. 161, obs. S. Guinchard et T. Moussa).

 

96. – Pièces visées – La demande en faux devant la Cour de cassation ne peut concerner que des pièces qu'il était impossible d'arguer de faux devant le juge du fond. Autrement dit, il ne peut s'agir que des actes de procédure intervenus à partir de la décision frappée de pourvoi. Sont ainsi visés le jugement ou l'arrêt attaqué, l'acte d'huissier de justice portant signification de ce jugement ou arrêt, l'extrait du registre d'audience que produit le défendeur au pourvoi pour bénéficier des dispositions de l'article 459 du Code de procédure civile (CPC, art. 459 : "l'omission ou l'inexactitude d'une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s'il est établi par les pièces de la procédure, par le registre d'audience ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été, en fait, observées" ) si la nullité du jugement ou de l'arrêt est alléguée, les actes de signification des mémoires produits devant la Cour de cassation dont peut dépendre la recevabilité du pourvoi.

2° Procédure 

97. – Phases de la procédure – La procédure comporte deux phases principales : l'autorisation préalable du Premier président (a) et la déclaration du défendeur à l'incident s'il entend ou non se servir de la pièce contestée (b).

a) Autorisation préalable du Premier président 

98. – Saisine du Premier président – La requête en faux incident est adressée au Premier président de la Cour de cassation et déposée au greffe en application de l'article 1028 du Code de procédure civile . Elle doit être signée de l'avocat à la Cour de cassation si le ministère de celui-ci est requis dans l'instance principale ou de la partie elle-même ou enfin, d'un mandataire spécial. La requête doit préciser les moyens sur lesquels se fonde l'inscription de faux et être accompagnée des pièces qui la justifient.

 

99. – Ordonnance du Premier président – Le Premier président de la Cour de cassation répond à la requête par une ordonnance, après avis du procureur général selon les termes de l'article 1029 du Code de procédure civile . Soit il juge la demande recevable et pertinente et autorise dans ce cas le requérant à s'inscrire en faux. Soit il rejette la demande et la procédure prend fin car son ordonnance est insusceptible de recours. Il peut en outre condamner le requérant à une amende civile dans les conditions de l'article 628 du Code de procédure civile .

 

100. – Contrôle sur le sérieux de l'incident de faux – Le Premier président de la Cour de cassation exerce un contrôle sur le sérieux de l'incident de faux. Ce contrôle porte sur trois points. En premier lieu, le Premier président vérifie que la requête est recevable ; en second lieu, il apprécie si les faits allégués sont vraisemblables ; en troisième lieu, il examine si l'acte argué de faux est utile, ou non, au jugement du pourvoi.

 

101. – Signification de l'ordonnance à la partie adverse – L'ordonnance portant autorisation de s'inscrire en faux ainsi que la requête sont signifiées à la partie adverse dans un délai de quinze jours avec sommation de déclarer si elle entend se servir de l'acte argué de faux en application de l'article 1030 du Code de procédure civile . Le délai de quinzaine ne court que du jour où l'expédition de l'ordonnance a été délivrée au demandeur à l'incident. Le défendeur doit répondre dans un délai de quinze jours à compter de la sommation. Sa déclaration doit être signée de lui ou de son avocat aux conseils. Elle est signifiée par acte d'huissier au demandeur ou à son avocat constitué.

b) Déclaration du défendeur à l'incident et ses suites 

102. – Le défendeur déclare ne pas vouloir se servir de l'acte litigieux – Si le défendeur déclare qu'il n'entend pas se servir de la pièce arguée de faux, celle-ci est rejetée du débat. La Cour de cassation statuera donc sur le pourvoi en tenant compte de la disparition de cette pièce. Elle prononcera alors généralement l'annulation de la décision objet du pourvoi ou de la procédure menée devant la cour, alors que le premier président a autorisé l'inscription de faux parce qu'il estimait que la légalité de la décision attaquée ou de la procédure de cassation dépend de la pièce ou de la mention litigieuse (Cass. 2e civ., 6 juill. 1967 : Bull. civ. 1967, II, n° 250. – Cass. 3e civ., 4 juin 1971 : Bull. civ. 1971, III, n° 358).

 

103. – Le défendeur déclare vouloir se servir de l'acte litigieux – En application de l'alinéa 2 de l'article 1031 du Code de procédure civile , si le défendeur déclare qu'il entend se servir de la pièce arguée de faux, ou s'il ne répond pas dans le délai de quinze jours de la sommation, le défaut de réponse valant une réponse positive tacite, le premier président, sur requête de la partie la plus diligente, doit renvoyer les parties à se pourvoir devant la juridiction qu'il désigne pour qu'il soit statué sur la demande en faux. Le Premier président dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour renvoyer devant n'importe quel tribunal de grande instance ou cour d'appel de son choix (CA Paris, 3 févr. 1987 : D. 1987, somm. p. 231, obs. P. Julien).

 

104. – Sursis à statuer – La Cour de cassation doit alors surseoir à statuer sur le pourvoi jusqu'au jugement sur le faux, par application de l'article 313 du Code de procédure civile dont les dispositions complètent celles de l'article 1031 du même code. En théorie, le sursis à statuer peut être écarté en application de l'article 313 lorsque "la pièce litigieuse est écartée du débat lorsqu'il peut être statué sur le principal sans en tenir compte". Mais il semble très peu probable que la chambre saisie du pourvoi ne sursoit pas à statuer alors que le premier président a autorisé la partie à s'inscrire en faux.

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